La vermifugation et les solutions anti-oeufs de mouches.

On entend bien souvent demander comment se débarrasser des œufs de mouche qui se collent sur les jambes de nos chevaux l'été, mais beaucoup moins comment il faut vermifuger... Alors que les deux cas ont un lien et que le second est quand même plus complexe et plus important que le premier. Pas de tracas, ici on est généreux et on parle des deux à la fois !



Pourquoi faut-il vermifuger ? Vermifuge chimique ou naturel ?


Avant tout, il faut savoir que tous les chevaux ont des parasites, tout le temps. La vermifugation ne consiste donc pas en l’éradication totale des parasites mais sert à maintenir le taux "d'infestation" suffisamment bas pour que cela ne devienne pas nocif pour l'organisme du cheval - le paradoxe étant qu'un taux minimum est également nécessaire pour maintenir son immunité. De plus, il ne faut pas oublier que la vermifugation n'est pas un acte anodin : il s'agit de tuer des parasites à l'intérieur même d'un être vivant ! Il faut donc agir très prudemment. 

La première étape dans la lutte contre les vers consiste donc à faire un examen coproscopique, c'est-à-dire une analyse des crottins afin de mesurer le taux de vers présents. Si les excréments contiennent plus de 200 oeufs de parasites par gramme (opg), alors il faut vermifuger avec la molécule qui combat le type de vers identifié, et uniquement celui-ci. Si le taux est correct, on peut se contenter d'un vermifuge naturel (cocktails de plantes tout prêts et testés avant leur commercialisation) ou ne rien donner (attention toutefois, comme tout examen, la coprologie n'est pas fiable à 100% et il faut donc en refaire très régulièrement).

Coprologie crottins de cheval.
Vous ne regardez plus les crottins du même oeil...
Crédit: magiedesegougnac.wordpress.com

L'idéal est donc d'alterner vermifuge chimique et naturel, en privilégiant le naturel si les résultats des coprologies faites avant et après la vermifugation et les conditions de vie du cheval le permettent. En effet, il est désormais prouvé que les vermifuges chimiques sont trop agressifs et détruisent la flore intestinal des chevaux (qui met ensuite entre 12 et 18 mois pour se reconstituer !), en plus d'être toxiques pour l'environnement lorsqu'ils sont rejetés dans les crottins et pénètrent dans la terre. Pire encore, après des années à conseiller de vermifuger entre 2 et 4 fois par an sans faire d'examen coproscopique, les vers ont développé une résistance aux vermifuges, et cette résistance se transmet génétiquement ! Au lieu d'entrer dans un cercle vicieux en vermifugant encore plus et plus fort, il faut au contraire changer la molécule du vermifuge chimique chaque année, tester les solutions alternatives comme les vermifuges naturels et ainsi conserver des chevaux au taux d'infestation correct qui vont rejeter dans l'environnement des vers "sensibles", c'est-à-dire qui réagissent encore aux vermifuges.

Notons que le travail fait en amont pour assainir l'environnement du cheval est très important. Le site des Haras-Nationaux précise bien que "90% des éléments parasitaires se trouvent dans le milieu extérieur, contre seulement 10% dans l’organisme des chevaux. Donc la vermifugation ne suffit pas, et l’action sur le milieu extérieur est beaucoup plus efficace que la vermifugation !". Il faut donc : 
  • Ramasser régulièrement les crottins dans le box et le pré. Sachez d'ailleurs que les poules éparpillent les crottins et permettent de tuer les vers en les exposant au soleil (en période chaude et ensoleillée bien sûr), ou encore que les vaches mangent les vers dangereux pour les chevaux sans rien craindre : nettoyage des pâtures 100% écologique et économique ! 
  • Traiter ses champs pour les assainir (faucher les refus, nettoyer le terrain, re-ensemencer...). 
  • Faire une rotation des parcelles avec 3 mois de repos pour chacune
  • Fournir à ses chevaux une alimentation équilibrée et variée afin de renforcer leur système immunitaire. 
  • Respecter à la lettre le protocole du vermifuge (détaillé plus bas) afin de ne pas risquer une ré-infestation. 



Quels vers à quelle saison ?


Les vers se développent particulièrement aux changements de saison. Même si on sait globalement lesquels apparaissent à quel moment, la coprologie permet d'identifier très exactement l'espèce de ceux présents dans l'environnement de votre cheval. De là, votre vétérinaire pourra vous indiquer quel vermifuge est le plus adapté pour combattre ce type de vers d'après le taux d'infestation et l'état de votre cheval (son poids, si c'est une jument gestante, un poulain, un cheval fragile, un cheval corpulent qui nécessitera deux doses...). Si un seul vermifuge chimique est donné dans l'année, on conseille de le donner au début du printemps, avant de mettre les chevaux au pâturage. 


Dates de vermifuges pour chaque saison et désignation des vers présents.
Calendrier rappelant quels vers sont présents à quelle saison - Crédit: Pharmacie-sterling.com


Il existe des vermifuges spécifiques pour chaque vers, c'est pour cela qu'il est important de les identifier, mais aussi d'autres vermifuges qui luttent contre plusieurs types de parasites en une seule prise. L'efficacité du traitement dépend donc du choix du produit, sachant qu'il est déconseillé d'utiliser d'une année sur l'autre les mêmes molécules (dans le cas du vermifuge chimique) afin justement de ne pas créer d'accoutumance chez les vers.



Comment le cheval est-il infesté ?


Les parasites sont tout simplement présents dans l'environnement, dans l'herbe que les chevaux broutent (plus particulièrement dans l'herbe rase ou dans les prés trop petits dans lesquels les chevaux n'ont pas d'endroit à l'écart pour déféquer), dans les fourrages... Les chevaux vivant en extérieur sont donc plus exposés, sachant que les zones humides (prés sur d'anciens marécages ou comportant un point d'eau stagnante) favorisent le développement des parasites. Mais les chevaux vivant au box n'échappent pas à ce fléau : les mouches pondent leurs petits œufs jaunes très reconnaissables sur leurs membres et en se grattant ou se frottant, ils les ingèrent. Et voilà les fameux vers qui éclosent dans l'organisme, ressortent dans les crottins et infestent de nouveau l'environnement. Un joli cercle vicieux.

Le cercle vicieux de l'infestation par les vers.
Comment un cheval se retrouve infesté de vers - Crédit: s403403540.onlinehome.fr




Quels sont les symptômes d'un cheval ayant des parasites ?


  • Présence de vers dans les crottins,
  • Diarrhée ou constipation,
  • Manque d'appétit, perte d'énergie qui peuvent être symptomatiques d'une anémie,
  • Ventre gonflé ou au contraire amaigrissement,
  • Queue irritée suite à des frottements, poil terne, apparition de poils longs sur le ventre et les flancs,
  • Avortement chez la jument pleine,
  • ...



Vermifugation, mode d'emploi


Les vermifuges existent sous de nombreuses formes mais sont le plus souvent donnés par voie orale sous forme de pâte, de liquide ou encore de granulés pour les vermifuges naturels. Avant le repas, on utilise une seringue introduite au niveau de la commissure des lèvres du cheval pour envoyer le vermifuge derrière sa langue. La tête du cheval doit être maintenue en l'air le temps qu'il soit ingéré.

Comment donner un vermifuge à son cheval.
Vermifuge administré par voie orale - Crédit: chevalmag.com

Après avoir été vermifugé, le cheval devra être surveillé quelques temps pour s'assurer qu'il ne fait pas une réaction allergique. Il peut avoir une légère diarrhée due à une fragilisation de la flore intestinale mais elle ne doit pas dépasser deux jours, ce qui correspond au temps d'action du vermifuge. Le cheval va en effet se "débarrasser" de ses parasites dans les 48h en faisant ses crottins. C'est pourquoi il est impératif 2 jours après avoir donné le traitement de nettoyer consciencieusement son box/pré pour retirer tous les crottins infestés et remettre le cheval dans un environnement sain. C'est également pour ça que les chevaux vivant en groupe doivent être traités tous en même temps pour ne pas se ré-infester les uns les autres.



Solutions anti-oeufs de mouches


Le cheval va forcément ingérer des oeufs de mouche puisque, comme on l'a expliqué, les parasites sont présents partout dans son environnement. Mais limiter leur absorption en tentant de les enlever n'est pas une mauvaise chose, même si un cheval correctement vermifugé ne craint pas grand chose et que les oeufs finiront par disparaître d'eux-même. Sachez néanmoins que les effets de leur ingestion ne se verront pas immédiatement puisque les oeufs de gastérophiles mettent 1 an à se développer et seront évacués de l'organisme lors de l'été suivant.

Plusieurs solutions pour venir à bout des oeufs de mouche sur les membres de votre cheval :
  • En prévention : comme on l'a dit plus haut, ramasser les crottins le plus souvent possible et éviter de mettre son cheval dans des zones humides. 
  • Frotter les œufs de mouche avec du vinaigre chaud ou une pierre ponce
  • Enlever les œufs au rasoir (demande un peu de patience et de prudence). Les scalpels à verrue sont apparemment diablement efficaces mais il existe aussi des couteaux spécialement créés pour cette opération. 
  • Enduire les membres d'huile d'olive réduirait ou limiterait l'apparition de nouveaux oeufs, soit pas asphyxie soit par manque de prise dans le poil. 



Le dernier mot Jean-Pierre...


L'accoutumance aux molécules et la nécessité de faire une rotation dans les produits est le résultat de l'utilisation intempestive et inutile des vermifuges. Il est urgent de remettre le protocole de vermifugation classique (2 à 4 vermifuges chimiques par an) en question. La logique et la prudence voudraient que l'on emploie d'abord toutes les solutions non-médicales (gestion et propreté des lieux de vie du cheval, utilisation de plantes et produits naturels) avant de passer aux produits chimiques dont l'utilisation n'est jamais anodine. Vous prendriez de la cortisone sans analyse ou avis de votre médecin, 4 fois par an, en simple prévention ? Toutefois, si votre cheval est dans un environnement que vous ne pouvez pas contrôler (dans un pré avec d'autres chevaux qui ne vous appartiennent pas), le chimique n'est pas à rejeter totalement : une injection dans l'année pourra apporter une certaine sûreté, tant qu'elle est accompagnée d'un examen coproscopique, qui devrait toujours être inclus dans le protocole de vermifugation.


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12 Cavaliers ont dit

  1. Si je puis ajouter quelques choses...
    L'un des symptômes d'infestation, qu'on retrouve sur les sujets très infestés, sont les long poils sur le ventre et le bas de flancs. Pas comme un poil d'hiver, mais comme quelques poils qui atteignent une grande longueur, répartis sur le bas des flancs. C'est difficile à décrire, mais immédiatement reconnaissable. Comme si le cheval avait des "rajouts" poil à poil un peu partout. Le poil terne est également un symptôme.
    Les chevaux infestés, c'est dans bien des endroits le cas des poulains qui sont largués dans un pré en attendant le débourrage, sont souvent à la fois maigres (raie de misère, hanches et côtes qui ressortent) et avec un ventre ballonné.

    Pour le moment d'administration du vermifuge, il a plusieurs écoles, mais on m'a toujours dit de le faire au moins deux heures après un repas et deux heures avant un autre (sachant que sur un cheval au pré ou même au box grignotant sa paille, l'estomac ne sera jamais complétement vide...).

    Voilà, article bien fait sinon, bonne idée de mettre les liens ! A quand un article sur les parasites externes ? (poux, tiques...) et sur la façon de repousser mouches, taons et moucherons ? C'est la saison !

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  2. Ah oui, et ne pas hésiter à faire une coprologie, pour identifier les parasites précisément, notamment sur un cheval très infesté, plutôt que de vermifuger à l'aveuglette, ce qui est une perte de temps, peut être nocif pour le cheval, et une perte d'argent.

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  3. J'ai rajouter les symptômes concernant les poils, merci :)

    Suite à ce que tu as dit et ce qu'à ajouter Sam, j'ai parlé un peu de la coprologie et de l'importance de prendre les vermifuges au sérieux.

    C'est vrai que maintenant j'entend souvent que ce sont les cavaliers eux-mêmes qui vont acheter les vermifuges et qui les donnent. Comme ça, sans être sûre que ce soit VRAIMENT les bons, car de toute façon seules les analyses peuvent le dire. Enfin, depuis toujours j'ai toujours entendu parler du fait de vermifuger de façon légère, comme du fait d'aller donner du mash, c'est juste un passage obligé dans l'année...

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  4. Super article, et je plussoie absolument : ne jamais négliger l'importance du vermifuge sous prétexte que c'est une procédure courante.

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  5. Article plutôt intéressant mais pourquoi le discréditer avec la dernière phrase: quel est le rapport avec la cortisone (avec un S) !!!

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    1. Oups, merci, c'est corrigé.

      Le but avec la dernière phrase était vraiment de finir en soulignant le fait que le vermifuge n'est pas un produit anodin. Même si on le répète et on l'explique aux cavaliers, c'est devenu tellement courant de donner son vermifuge car c'est la période et que tout le monde fait comme ça qu'on continu en se disant: après tout, jusque là, il n'y a pas eu de problème,on va pas de casser la tête à changer les habitudes. Du coup une comparaison avec un produit humain me paraissait plus percutante et parlante pour bien faire comprendre l'impact du vermifuge.

      Mais effectivement, le message est peut-être assez clair sans ça...?

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  6. Les grands esprits se rencontrent comme on dit :)

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    1. Eh oui ! C'est pour ça que ça m'a fait sourire de voir paraître ton article, sachant que la republication de celui-ci était déjà programmée. En même temps pas de mystère: c'est la saison pour ce sujet !

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  7. Ha la question des vermifuges. Une longue prise de tête... Personnellement, je suis assez frustrée par le manque de communication autour des résultats des vermifuges naturels. Ce qui est totalement compréhensible quand tu vois le business juteux que les versions chimiques représentent.

    De plus, souvent les versions naturelles embarquent de l'ail :/ Après il y a des choses intéressantes dont l'huile de pépins de pamplemousse en cure ou l'écorce de noix de coco :)

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    1. C'est vrai, quand j'ai retravaillé cet article, j'ai eu beaaaaucoup de mal à trouver quelques sites sérieux sur les vermifuges naturels ou de vrais retours d'expérience... A croire que leur utilisation est confidentielle ?!

      Que reproches-tu à l'ail ? C'est toujours le premier ingrédient que j'entend cité pour ses propriétés insectifuges.

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    2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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    3. Ils en parlent mieux que moi : http://www.techniquesdelevage.fr/article-l-ail-pour-les-equides-ses-effets-indesirables-116365747.html :)

      Je crie personnellement au complot pour les vermifuges naturels même si tu as des articles intelligents sur le site TheHorse.com : http://www.thehorse.com/articles/33500/micronized-coconut-and-onion-a-natural-equine-dewormer

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